Randonnée orange


Dimanche matin, le soleil était encore emmitouflé dans sa couette de nuage, lorsque nous nous sommes étirés sur le sentier tel un long chapelet de saucisses oranges. Munis d’une simple carte, mais visiblement démunis de tout sens de l’orientation, nous avons dû capituler au 1er embranchement, et confier au bon soin d’un téléphone portable, la délicate tâche de nous mener au but. Après avoir réveillé à peu près tout ce que la forêt comptait d’animaux nocturnes, et avoir fait fuir la plupart de ses locataires diurnes, nous sommes enfin arrivés, peu avant midi, sur les lieux supposés de “La grotte de la chèvre d’or”. Bien que l’entrée fut plus rapide à trouver qu’un trou dans du comté, nos estomacs pas vraiment endormis se sont alors réveillés, remettant à plus tard notre exploration souterraine.

   

Après un agréable repas champêtre, c’est ventres pleins, cœurs vaillants et frontales au vent que nous sommes retournés affronter la solitude des profondeurs. D’après une légende, le lieu, dans des temps reculés et sauvages, servait d’abri à une tribu de nomades dite des « Ecureuils ». Cette tribu avait pour habitude de laisser derrière elle des caches de nourritures et des indications permettant de les retrouver au fil des saisons. Bien que cette histoire nous ait semblé hautement fantaisiste, quelle ne fut pas notre surprise de découvrir dans la pâle lueur vacillante s’échappant de nos fronts marqués par la perplexité, des pierres peintes de symboles mystérieux, qui une fois remontés à la surface et décodés nous livraient un message encore plus mystérieux : “ugr to na tar”. Par chance, nous disposions d’un dictionnaire “Dialecte écureuil / Français” qui nous permit de comprendre qu’une cache était probablement dissimulée “Au fond à gauche” (à moins que ce ne fut, plus prosaïquement, un lieu d’aisance ?).

 

Rebelote et dix de der, nous redescendîmes dans les bas fond, et après avoir parcourus les entrailles de la terre et croisé deux ou trois pipistrelles, nous trouvâmes un pot scellé que nous ramenâmes discrètement (car il s’agissait à n’en pas douter d’un vestige historique) à l’air libre. Il nous fallut alors comprendre le mécanisme rudimentaire mais néanmoins efficace de fermeture, pour délivrer le contenu sans briser le contenant. Stupéfaction, le pot ancestral était rempli de noisettes probablement multiséculaires ! Stupéfaction et dix de der, elles s’avéraient parfaitement comestibles, et trouvèrent dans nos tubes digestifs un nouveau refuge pour les siècles à venir.

Il était 15h30 lorsque nous entamions le chemin du retour, pressés de retrouver les parents et le goûter (pas forcément dans cet ordre). A 16h15 la boucle était bouclée, mais dans l’intervalle, que d’aventures !

— Luc